Philippe-Liev POURCELOT - points de vue : cinq propositions de regards contraints

Né en 1964 à Annecy, Philippe-Liev Pourcelot vit et travaille à Lyon.
Grand Prix du Salon International de la Recherche Photographique de Royan en 1993 et Prix du Mois de la Photographie de Talant en 1995, il a réalisé de nombreuses expositions en France et à l'étranger (Paris, Lyon, Arles, Wroclaw, Bratislava...).

Son travail est présent dans diverses collections publiques et privées (Bibliothèque Nationale de France, Musée National d'Art Moderne, artothèques...).
Il enseigne la photographie à l'Université Lumière Lyon 2 (Institut de la Communication).

 



 
point de vue

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argentique, paysage






 

A travers ces cinq propositions, j’ai cherché à m’affranchir de cette pratique courante qui consiste à choisir un point de vue quand on photographie. J’ai donc imaginé des procédés destinés à “automatiser” la prise de vues. Des “machines à photographier”, auxquelles j’ai délégué une part non négligeable de l’acte photographique : le cadrage.

Bien sûr, ces protocoles de prise de vues, qui fonctionnent comme des contraintes oulipiennes, sont en rapport avec le fait de voir, de regarder, de cadrer : c’est bien de photographie dont il s’agit.



Proposition n°1 : Le regard des statues
Dans cette série, les statues imposent, par la permanence de leur posture et de leur regard (même s’il n’est qu’une vue de l’esprit), un découpage intangible du réel. La photographie est prise au 50 mm, (distance focale correspondant à celle de l’œil humain) en collant l’appareil à l’œil droit de la statue. Le liseré noir, marque de la limite du négatif, atteste du respect absolu du point de vue de chaque statue.
Le cartel en couleur constitue à la fois un contrechamp et une signature.

Proposition n°2 : Anna 96-98
Les photographies de cette série ont été faites en plaçant l’appareil photo sur l’œil droit d’Anna, durant les premiers mois de sa vie, dans des situations quotidiennes : sur son matelas à langer, dans son landau, puis plus tard, dans sa poussette, dans sa chaise haute … La série s’est arrêtée d’elle même le jour où Anna a demandé à prendre, seule, sa première photographie.
Le cartel en noir et blanc représentant Anna à différents âges de sa vie donne la “date” à laquelle les photographies en couleur ont été prises.

Proposition n°3 : Judas de porte
Voir à travers. Une fois la porte de l’appartement fermée, le judas constitue un œil immobile sur ce qui n’est pas chez soi, sur le monde extérieur. Les photographies de cette série ont été prises en collant l’objectif de l’appareil photo à cet œil.

Proposition n°4 : Miroirs de signalisation
Voir dans. Les bords des miroirs de signalisation que l'on trouve dans les rues où la visibilité est limitée pour les automobilistes, cadrent le réel. Les rayures de signalisation certifient la provenance des prises de vues, et constituent un cadre, une sorte de “Marie-Louise” à l’image.

Proposition n°5 : Point de vue
Les panneaux de signalisation routière “point de vue” sont pris ici comme une incitation (un ordre ?) à photographier. Les panneaux, comme des motifs, imposent là encore un “cadrage”. Cette fois-ci, contrairement aux miroirs de la proposition n°4, le cadre est paradoxalement situé au centre de l'image. Le paysage photographié de cette manière prend place alors en bordure.
Là où se situe le panneau, il n'y a effectivement point de vue...

 

Philippe-Liev Pourcelot

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