Dominique LARDET - 1b - La femme qui marche - 1 Sous-Série "Ruban bleu"
Photographe auteure autodidacte, Dominique LARDET est née à Lyon en 1951. Professeur de lettres classiques, elle est frappée de surdité en 1991 et se reconvertit six ans plus tard tout en restant dans l’Éducation nationale. En 2009 devenue sourde profonde elle se réfugie dans une pratique expérimentale de la photographie.
Elle espère ainsi garder contact avec le monde qui l’entoure mais aussi exprimer dans ses images la perception difficile ou faussée, la communication décalée ou minimale voire l’isolement qu’impose un handicap presque invisible. Sans en faire pour l’instant un réel sujet, elle marque de surdité toutes ses photographies, c’est pourquoi elle met en œuvre le flou, les filés de lumière, la surimpression, les reflets et autres transpositions.
|
|
||||
L’espace intérieur ! Telle est la surimpression, la seule, que Dominique Lardet impose à ses réalisations, et ceci, pour le dire d’une manière abrupte, qui ne prend pas en considération le détail des modalités combinatoires mises en place pour l’invention d’une vérité plus belle que l’objectivité. Elle l’affirme elle-même fortement avec La Femme qui marche, titre d’une série qui donne la note de fabrique de l’ensemble de sa production : que le paysage soit maritime, sablonneux, désertique, parsemé d’algues ou d’empreintes, elle est là, toujours la même, toujours elle-même, non pas au centre mais en retrait de la vue globale, dans une présence à la fois improbable et stratégique, comme si la profondeur du regard s’installait au coeur de ses prises de vue éparses.
On retrouve en cheminant dans chaque série un même contraste entre un éparpillement d’images et une structure d’harmonie qui peut être d’ordre plastique ou parfois narratif comme dans Le Ruban bleu. Dans cette série, en effet, tout commence avec un instantané : une épitaphe dont le texte est partiellement caché par une gerbe de fleurs retenue par un ruban bleu. Comme dans un flash, le prénom de Lynda s’éclaire, sort de l’obscurité où le destin l’avait plongé pour hanter la vision d’une photographe. Les paysages du comté de Durham, calmes et verdoyants, débordent de leurs cadres naturels pour envahir la vie urbaine. Un gisant, surgi des ondes, étale son silence éternel au parvis de la cathédrale St Cuthbert, les colonnes et les pilastres de la nef se confondent avec les ramures et les frondaisons des arbres forestiers, l’écume des étangs bouillonne comme après l’immersion d’Ophélie et des pommes géantes jonchent le gazon des cottages. La photographie se permet de devenir extralucide et découvre la magie des rêves d’enfance pour livrer d’imaginaires hypothèses sur l’incompréhensible absence de Lynda.