Thomas KELLNER - Contacts Noir & Blanc 1997-2005

«Est-il possible d’imaginer un bâtiment en état d’ébriété? La danse d’un monument au son d’un conte de fées? Un bâtiment ayant le vertige? Ce sont quelques-unes des questions que l’on se pose lorsque Thomas Kellner travaille, lorsqu’il montre d’une manière nouvelle et originale certains des bâtiments les plus photographiés dans les métropoles du monde. C’est comme si Kellner donnait à ces bâtiments une renaissance personnalisé au-delà des stéréotypes, des images touristiques qui se ressemblent toutes. Le résultat est unique. «(Bangsund-Pedersen, Ditte M.)
 

L’exposition à la Galerie Vrais Rêves donne un aperçu des projets les plus importants de ces 15 dernières années. Ce sont des Monuments (1997 - en cours), Tango Metropolis (2004 - en cours), Danse Murs (2005 - 2007), Brasilia (2004 - 2009) et le monde de l’entreprise, Genius Loci (2012 - 2014).
La série « Monuments » traite de célèbres bâtiments européens, comme Big Ben, Tower Bridge ou la Tour Eiffel. Thomas Kellner y apporte son regard personnel et nous permet de redécouvrir ces monuments architecturaux que nous pensions bien connaître. Dans cette série son regard se porte  sur les formes extérieures alors que dans la série « Dancing Walls » il se concentre sur les intérieurs de ces constructions et découvre comment traiter l’intérieur des bâtiments cubiques. Dans  « Tango Metropolis » le champ photographié s’élargit, les photos sont de plus en plus grandes, la résolution est plus élevée et il y a plus de composants et de détails qu’auparavant. Pendant six ans Thomas Kellner a photographié la ville de Brasilia.
Ce projet « Brasília – 50 ans d’utopie moderne » était, pour lui, un hommage à l’architecture moderniste de Oscar Niemeyer et une proposition d’exposition pour le 50e anniversaire de la ville. Les photographies montrent non seulement de façon emblématique la ville la plus importante sur le plan architectural, mais se réfèrent également aux autres visions de l’architecte. Le projet “Genius Loci” - deux allemands de Siegen dans le pays des tsars - traitéd’une manière artistique et photographique avec deux zones industrielles importantes en Allemagne et en Russie, deux zones liés l’une à l’autre à travers l’histoire commune de la culture industrielle.
 

 



 
Technique
Photographie argentique
Texte
CV-Resume
www.thomaskellner.com
Autres séries
Contacts Noir & Blanc 1997-2005
variables suivant le nombre de vues ou le nombre de pellicules. chaque vue mesure 24 x 36 mm

Mots-clé associés
noir.et.blanc, paysage, argentique, architecture, fantastique, chaos






 

Lorsque nous avions rencontré Thomas KELLNER à Arles en 1998, nous lui avions dit que nous trouvions son travail intéressant, et promis que nous ferions quelque chose avec lui. La promesse a été tenue, mais très tardivement, c’est-à-dire seize ans plus tard. En fait, ce n’était que pour mieux recommencer... Après 2014, voici une nouvelle proposition que nous avons souhaitée soutenir, celle d’une présentation dédiée exclusivement aux photographies Noir et Blanc. Cette exposition tourne en Europe et au-delà, en Asie et sur le continent américain, et sera donc bientôt en France, à Lyon.  
A noter qu’un catalogue “Contacts N&B 1997-2005” est édité par la galerie pour cette exposition  32 pages 21x21 cm au prix de 10 € . Sur commande, le catalogue par envoi postal  : 13 €.



 A propos du travail de Thomas KELLNER



Rémy MATHIEU  : Ton travail porte sur la déstructuration et la recomposition de monuments, quel est pour toi le sens profond de cette démarche ?

Thomas KELLNER : En 1997, quand j’ai commencé à m’intéresser à la Tour Eiffel, j’ai eu l’idée de construire une analogie photographique à l’orphisme de Robert Delaunay, car j’avais déjà travaillé depuis de nombreuses années sur des approches à points de vue multiples. Ces expérimentations photographiques, je les avais menées aussi bien en laboratoire qu’au niveau de la prise de vue.
Jusqu’à ce jour, un propos de mon maître m’a marqué : « Tu ne dois pas reproduire ce que tu vois, cela existe déjà ». Il entendait par là la stricte reproduction par le moyen d’un appareil photo.  Parallèlement, je me demandais comment la photographie pouvait encore être un Art, alors que dans l’Art photographique, les moyens picturaux de la perspective centrale de la Renaissance y étaient toujours valables après plus de 150 ans, et que l’Art pictural, à l’époque des « ismes s’était lui libéré jusqu’à l’abstraction totale des conventions de la reproduction de l’image ». Aujourd’hui, mon travail photographique propose des alternatives à cette réalité.


RM : Pour la réalisation de tes images, tu utilises le principe de la planche contact qui est un outil propre à la photographie analogique du XX° siècle. Comment abordes-tu la modernité des outils numériques du XXI° siècle ?

TK : Les « planches contacts » sont pour moi un signe de modernité dans l’image photographique, car je mets en valeur la matérialité du film 35 mm. Sans le 35 mm, l’histoire des techniques de la photographie et de celles du cinéma hollywoodien, serait impensable. Je ne crois pas que l’image numérique soit la marque distinctive du 21ème siècle. En effet, elle n’est pas en opposition avec la matérialité des siècles précédents, bien que le traitement des images, par exemple, ne puisse plus se faire comme par le passé dans le seul laboratoire analogique.
Cependant, les petits travaux en noir et blanc du début de mes « planches contacts » sont un témoin de la possibilité d’abstraction d’une image en noir et blanc traitée de façon conventionnelle en laboratoire analogique. Or, les travaux plus imposants, en couleur, qui ont vu le jour dans d’autres séries, n’auraient jamais pu être élaborés dans un laboratoire analogique. Ils ont été photographiés analogiquement, puis retravaillés numériquement et tirés sur agrandisseur numérique. Aujourd’hui, quels que soient leurs formats, mes tirages photographiques noir et blanc sont exposés numériquement sur un papier baryté argentique.

RM : Pourquoi ce choix esthétique du noir et blanc dans cette exposition ?

TK : Dans les premiers travaux en noir et blanc, mon cheminement apparaît clairement. Pendant mes études, je me suis intéressé presque exclusivement aux expérimentations en laboratoire analogique noir et blanc, et aux techniques d’impression noble du début de la photographie, telles que les papiers salés, la gomme bichromatée, le bromoïl, le cyanotype, et bien d’autres procédés.
Dans ces premières images noir et blanc, deux choses sont particulièrement visibles :
- la conception cubique, avec une volonté de fragmenter les éléments photographiés afin de se rapprocher du cubisme.
- les gammes de gris entre motif (l’objet photographié) et structure (celle du film 35 mm avec ses informations), qui se trouvent sur le même plan que le noir, forment ainsi une nouvelle unité. Le mouvement de mon appareil reste visible, comme la synthèse, la matérialité du film et l’analyse. C’est entre autres pour cela qu’Irina Chmyreva (co-fondatrice et directrice artistique de Photo-Visa, Festival International de Photographie qui se déroule à Krasnodar en Russie) conclut, à propos de mes photographies, à une synthèse analytique visuelle.

Propos recueillis par Rémy Mathieu
Traduction Carine Foeller en 02/2017

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